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7 mars 2013 4 07 /03 /mars /2013 09:20

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Pierre Besse présente la délégation. A la caméra Maria; à sa droite Dimitris

 

l’APRES recevait dans le cadre des soirées  organisées au Recantou  une délégation de trois militants grecs venant s'informer sur nos AMAP et sur nos partenariats paysans-consommateurs. Un public composé de militants associatifs toulousains, de consommateurs du Recantou et de quelques producteurs du lieu dont Josian Palach et Alain Moles, parmi les fondateurs de l’épicerie-culturelle. C'est le réseau international Urgenci (urgenci.net) qui a planifié ce voyage, et qui a confié à Nicole et Pierre Besse (3) l'accueil de cette délégation. En lien avec quelques producteurs d'ici et quelques amis, et avec l'aide du réseau des AMAP de Tarn, Pierre Besse a coordonné un programme pour ces 5 jours de visites et de rencontres. Autant pour les visiteurs grecs que pour les organisateurs, cette mission est bénévole. Urgenci mobilise des fonds européens (programme Grundtvig) et l'association grecque Dio (association de promotion de l'agriculture bio) fournit un complément, pour couvrir les frais de déplacement et de séjour. Ces budgets étant limités, c’est de façon solidaire qu’ont été accueillis les militants grecs. Hors billets d’avion, la quasi-totalité des frais de séjour (hébergement, repas, déplacements) ont été pris en charge par l’AMAP de la Digue et le réseau des AMAP du Tarn, avec le concours de l’association l’Après et de l’AMAP Font de Cabrol.

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       Andreas Georgakakais                                                       Dimitris Machairidis


Lors de cette soirée, au Recantou, devant plus d’une trentaine de personnes, Maria, Andreas et Dimitris ont donné des éléments sur l’état de l’agriculture grecque aujourd’hui mais plus largement aussi sur le sentiment dans le pays frappé par une crise subie par tous. Des réponses tentent d’être apportées avec l’organisation de circuits courts. C’est dans la perspective de voir ce qui se fait en France et d’enrichir leur expérience que les militants grecs ont notamment visité - autour des circuits courts - deux fermes maraîchères en AMAP à Lagardelle-sur-Lèze (Nigel Parker, Pierre et Nicole Besse), la ferme d’Alain et Véronique Gatti, maraîchers en AMAP à St-Jory et le point de distribution de « paniers paysans » proposés par l’APRES à la librairie Floury, rue de la Colombette. Le débat et les questions ne manquaient pas venant d’un public très concerné par la situation en Grèce.

Lors de cette rencontre, l’APRES trouvait là toute la pertinence de son engagement pour contribuer au croisement des expériences, aux complémentarités des luttes, aux solidarités Nord-Sud, mais aussi Nord-Nord comme ce soir là. Enfin l’espace du Recantou continue d’exister au-delà d’un point de vente direct, mais comme une place de résistance à la grande distribution et à la malbouffe.

Et comme d’habitude, la convivialité autour de l’assiette des produits du cru et d’un verre de vin, facilitait les échanges dans un mélange de grec, d’anglais et de français…

 

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                                                                Maria Partalidou

 

 

(1)   Pierre Besse est co-auteur du livre « La Bio entre business et projet de société » Editions Agone. Il était venu au Recantou, avec Philippe Baqué, en juin 2012 présenter cet excellent livre.

 

La délégation grecque était composée de :
- Andreas Georgakakis, qui travaille pour Dio, association grecque de promotion de l'agriculture bio. Andreas a organisé en 2011 et 2012 deux rencontres en Grèce en 2011 et 2012, auxquelles Pierre Besse participé pour Urgenci.
- Dimitris Machairidis, agriculteur de la région de Thessalonique
- Maria Partalidou, universitaire spécialisée en sociologie rurale à la faculté d’agriculture de Thessalonique et impliquée dans le mouvement des partenariats directs en Grèce. Maria a assisté à une des réunions que nous avons eues à Thessalonique en mai 2012.


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                        discussion entre Pierre Besse, Alain Moles et Andreas Georgakakis

 

 

le programme :

Mardi 8 mars :

Après-midi et soirée, visites de 2 fermes maraîchères en AMAP à Lagardelle-sur-Lèze (Nigel Parker, Pierre et Nicole Besse).

 

Mercredi 6 :

Matin, visite chez Nicolas Mysline, éleveur de volailles à Marliac.

Après-midi, visite chez Alex Franck, producteur de pommes à la ferme de Vernou à St-Quirc.

A 18h, rencontre avec les "Paniers paysans" de Toulouse, groupe de consommateurs en partenariat avec des producteurs du Tarn-et-Garonne.

A 19h19 soirée-débat au Récantou, à Toulouse. Le Récantou est une "épicerie paysanne" en lien avec des producteurs locaux, c'est aussi le siège de l'association "l'Après" qui organise cette soirée.

 

Jeudi 7 :

Matin : visite chez Alain et Véronique Gatti, maraîchers en AMAP à St-Jory.

A midi, repas avec des élus au Conseil Régional.

Après-midi et soirée, des rencontres à Ramonville : visite de l'expérience de construction autogérée de l'Habitat Groupé du Canal, rencontre avec des membres du réseau Floréal (partenariat avec des producteurs bio d’Andalousie) et avec l'AMAP font de Cabrol (Philippe et Christine Perramond, viticulteurs dans l'Aude qui ont démarré un jardin maraîcher avec une AMAP de Ramonville).

Vendredi 8 :

journée dans le Tarn organisée par le réseau des AMAP du Tarn : visite de la couveuse d'activité agricoles du Mas de Rest à Gaillac, rencontre avec le Miramap, et visite chez Daniel Coutarel, éleveur-polyculteur en AMAP.

Vers 20h, à Lagardelle, repas partagé avec l'AMAP de la Digue.

 

Samedi 9 :

Matin : rencontre à Tournefeuille avec l’Association des Jardiniers de Tournefeuille, visite des jardins partagés. Accompagnatrice : Delphine Garapon.

 

 

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Les partenariats producteurs-consommateurs

en Grèce

Andreas Georgakakis – Mars 2013

 

[Notes du traducteur : Andreas Georgakakis travaille pour DIO, association grecque de promotion de l’agriculture biologique. Les CSA - Community Supported Agriculture – sont la forme anglo-saxonne des AMAP (USA, Canada, Europe du Nord). « CSA for Europe » est un programme d’échanges entre pays européens sur les partenariats solidaires producteurs-consommateurs. Il est financé par les fonds européens Grundtvig et coordonné par Urgenci, le réseau international des initiatives d’agriculture soutenue par la communauté (urgenci.net).]

 

Depuis le démarrage du projet Grundtvig « CSA for Europe », et avec l’approfondissement de la crise économique en Grèce, nous essayons de stimuler les mouvements de solidarité impliqués dans la distribution alimentaire.

 

Le « mouvement de la patate[1] » s’est développé depuis maintenant un an, et a diversifié les produits concernés. Les besoins immédiats de la population pour une consommation à bas prix ont amené à l’établissement de nouvelles formes de distribution des produits. Spécialement pour les produits agricoles, à l’exception de la vente directe de produits bio sur les marchés, déjà existante, il y a maintenant des dizaines de marchés de plein vent partout dans le pays, où les agriculteurs viennent vendre leur propre production directement aux consommateurs. Les produits ainsi vendus ne sont pas nécessairement issus d’une production durable ou bio. Les vendeurs sont en général de petits ou moyens agriculteurs (par rapport à la moyenne grecque) qui font en majorité une production conventionnelle, et l’interaction avec les consommateurs est limitée sur les stands de marchés de plein vent. Jusqu’à maintenant, ces initiatives de solidarité alimentaire se sont focalisées davantage sur le prix que sur la qualité des produits – ceci même si c’est un moyen/solution très important pour les grecs qui font face à une crise qui empire chaque jour.  

 

L’exemple ci-dessous est très représentatif. L’interaction entre consommateurs et producteurs dépend surtout du niveau d’auto-organisation des consommateurs. Les groupes de consommateurs qui ont eu connaissance de formes de partenariats élaborés ont une relation plus interactive avec les paysans. Par exemple, dans la ville de Katerini, berceau du mouvement de la patate, des centaines de gens ont rejoint ce qui s’appelle maintenant le mouvement « sans intermédiaires ». Leur comité organise une sorte d’ « appel d’offres » régulièrement, où les producteurs affichent les produits et les prix, et les consommateurs votent pour les producteurs qu’ils préfèrent voir entrer dans le système d’échange direct, selon le prix et la qualité de leurs produits. Ce système inclue aussi des produits autres qu’alimentaires (détergents, papier-toilette et autres produits de consommation courante), et les produits offerts sont acceptés non seulement de producteurs individuels mais aussi de coopératives, voire de petites entreprises commerciales.

 

Avec plus ou moins les mêmes méthodes, des groupes de consommateurs ont organisé et établi des groupes solidaires et des points de vente dans les grandes villes, où les consommateurs peuvent acheter des produits agricoles. Dans ce cas, il est clair qu’il y a un intérêt des consommateurs pour les produits bio, même si on y trouve aussi des produits conventionnels. Ces initiatives font croître et s’approfondir leurs relations avec le reste de la société, et ces derniers mois on voit que ces groupes essaient de joindre leurs efforts vers une agriculture fondée sur la solidarité, en nouant de plus en plus de liens avec les petits paysans. Un exemple très représentatif est le cas de 14 initiatives dans la ville de Thessalonique, qui tentent de se réunir pour établir un réseau ouvert et autonome d’échange de produits agricoles. Parmi les groupes qui ont rejoint cette coalition, il y a un groupe de paysans d’un village de la préfecture de Greneva, ce qui pourrait conduire à l’avenir vers une forme plus proche des CSA.

 

Ces initiatives « sans intermédiaire » ont leur origine non seulement dans le « mouvement de la patate » mais aussi dans d’autres mouvements issus de la résistance aux mesures d’austérité. Un bon exemple en est la formation du groupe « Svoura », dans la ville de Corinthe, qui s’est formé comme une action de type « occupy the streets » à l’occasion des grandes manifestations qui ont secoué tout le pays. Ces derniers mois, ils ont organisé beaucoup d’actions de solidarité (comme des distributions de nourriture aux sans-abri) et ils ont déjà établi une sorte de schéma d’AMAP en établissant un lien entre vingt producteurs locaux et quatre-vingt familles de consommateurs. Les consommateurs commandent chaque semaine les produits dont ils ont besoin, sur une liste de produits disponibles (légumes, fruits, huile, vin…) fournie par les producteurs, et ils se rendent sur un point de distribution pour récupérer leur commande. Cependant les paysans ne dépendent pas exclusivement de ces revenus pour vivre, ils ont d’autres modes de vente.

 

Les schémas cités ci-dessus peuvent être qualifiés de réaction spontanée de gens qui essaient de faire face à la crise. D’un autre côté, il y a aussi quelques cas de partenariats établis grâce à l’énergie de quelques pionniers qui connaissaient déjà les CSA, ou qui s’y sont familiarisés à l’occasion des actions que DIO a organisées dans le cadre du programme « CSA for Europe ». Mais dans tous ces cas également, les paysans écoulent seulement une partie de leur production via les CSA, ils vendent le reste ailleurs, surtout sur les marchés de rue.

 

En faisant connaître le projet « CSA for Europe » via notre site web, par le magazine de DIO et par les manifestations mêmes du programme (deux tournées d’information, organisées à Athènes et dans le nord de la Grèce, ainsi que deux mission d’étude des CSA allemands et anglais) nous avons pu entrer en contact avec des individus et des groupes qui sont très intéressés à créer ou à rejoindre des CSA, et nous sommes heureux que le programme « CSA for Europe » air pu aider à motiver les gens et à les faire se rencontrer !

 

Il y a deux CSA dans la ville d’Athènes, avec des consommateurs qui soutiennent deux paysans situés près de la ville de Marathon, à environ quarante Km d’Athènes. Dans un de ces CSA, Thomas Anemos, un « leader » du groupe de consommateurs « Agronaftes » (http://agronaftes.blogspot.gr/) a participé au voyage en Allemagne du projet « CSA for Europe ». Le paysan, Thodoris Arvanitis, avait hébergé Rupert Dunn, du Pays de Galles, un des conférenciers de la session d’information « CSA for Europe » tenue lors de l’écofestival d’Athènes en novembre 2011. Thodoris a rejoint ce CSA à l’automne 2012, alors que le précédent fermier du groupe avait décidé de quitter le CSA. Il y a un autre petit CSA formé par Diamantinis Antonis, un jeune paysan de Corinthe, qui cultive des légumes selon les principes de l’agriculture naturelle. Il est soutenu par un groupe de 15 consommateurs et il bénéficie d’informations de valeur sur les techniques de production de la part d’un membre de DIO, Aris Elias. Il y a enfin un autre petit CSA qui s’est formé dans la petite ville d’Amaliada, dans l’ouest du Péloponèse. Nikos Koutsodimos, un producteur bio d’agrumes, a participé à la mission « CSA for Europe » au Royaume Uni. A son retour il a rencontré Tina Limberis, une femme très motivée qui donne des séminaires et fait la promotion de la permaculture (www.kangouro.gr). Tina avait déjà dans l’idée de monter un CSA, et Nikos l’a convaincue que ça valait la peine d’essayer. Maintenant, autour de Nikos, ce sont cinq paysans bio qui font un panier hebdomadaire pour environ vingt consommateurs.

 

Nous connaissons quelques autres initiatives mais la plupart sont en cours d’organisation en vue d’établir de véritables CSA. Une raison principale à cela est que dans ces groupes il n’y a que peu de personnes qui soient à même de trouver des paysans prêts à tenter cette aventure, et que les gens dans ces groupes n’ont pas une idée très claire sur le moyen d’adapter les pratiques des CSA à l’état des choses en Grèce aujourd’hui.

 

Enfin, il faut noter aussi qu’il y a des entreprises qui proposent des formules de « paniers verts » aux consommateurs, initiées par des producteurs – ou des revendeurs en lien avec des producteurs. Ces schémas sont de type commercial, en ce sens que les consommateurs n’ont pas d’autre interaction avec le paysan que l’échange « argent contre produits ».

 

Pour finir, on peut conclure que la crise force les grecs à chercher et à trouver des alternatives à la chaîne de distribution alimentaire. Les idées et pratiques du mouvement des CSA peuvent être adoptées facilement par les groupes nouvellement formés. Ce qui a été accompli jusqu’à maintenant montre qu’il y a beaucoup de potentiel, mais aussi beaucoup d’incertitudes. On peut le voir dans le fait que dans toutes les initiatives que nous connaissons, les paysans ne distribuent qu’une partie de leur production aux groupes de consommateurs. Ce dont on a besoin, c’est de personnes davantage persuadées, ayant une vision claire, qui pourraient attirer les autres, et bien sûr du savoir technique pour montrer qu’une ferme reposant entièrement sur un CSA est viable. DIO, à travers les actions du projet Grundtvig « CSA for Europe », a déjà apporté son aide, et durant les derniers mois du projet il nous reste beaucoup à faire.



[1] Le “mouvement de la patate” a commence au début de 2012 comme une tentative de court-circuiter les intermédiaires et pour connecter directement les producteurs et les consommateurs, avec comme premières actions la livraison de tonnes de pommes de terre directement dans le centre de beaucoup de villes grecques, où elles ont été distribuées aux citoyens à bas prix. Pour plus d’information, voir :  

http://newint.org/features/2013/01/01/greece-potato-movement/

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